Dans le cadre du programme EAF Nansen[1], l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation (FAO) appui le Ministère des Pêches et de l’Economie maritime à travers la Direction des Pêches maritimes du Sénégal pour la mise en œuvre de l’approche écosystémique des pêches pour la gestion des stocks partagés de sardinelles au Sénégal.

[1] Le programme EAF-Nansen « Soutenir l’application de l’approche écosystémique pour la gestion des pêches en tenant compte des impacts climatiques et de la pollution » est une initiative visant à soutenir la mise en œuvre de l’approche écosystémique dans la gestion des pêches marines. L’objectif est de promouvoir l’utilisation durable des ressources marines vivantes et une meilleure protection de l’environnement marin. Le programme est exécuté par la FAO en étroite collaboration avec l’Institut de recherche marine (IMR) de Bergen, Norvège et financé par l’Agence norvégienne de coopération pour le développement (Norad).

Les parties prenantes de la pêche aux Sardinelles se sont réunies pendant deux jours à Dakar pour discuter des problèmes et des solutions à apporter pour la gestion durable de la pêche des sardinelles au Sénégal et dans la sous-région.

Une approche régionale et nationale

Les sardinelles sont pêchées par des flottes artisanales[1] et industrielles, tout au long de leur migration sur les côtes Nord-Ouest Africaine, y compris au Sénégal, où 200 000 tonnes de sardinelles ont été en moyenne annuellement débarquées ces dix dernières années.

Les sardinelles sont très demandées, car traditionnellement consommées dans la région, et constituent une source de protéines animales, de micro nutriments et d’acides gras, à prix abordable . Ces stocks sont donc stratégiques pour toute la sous-région et la gestion durable de ces ressources doit constituer une priorité.

Cependant, l’état de ces stocks est préoccupant, puisque les travaux les plus récents du Comité des Pêches pour l’Atlantique Centre-Est (COPACE) pour l’évaluation des petits pélagiques ont exprimé des inquiétudes concernant la sardinelle ronde (Sardinella aurita), considérant ce stock comme surexploité. Les pêcheurs de tous les grands sites de débarquement du Sénégal ont confirmé que la sardinelle ronde (Yaboy), est devenue rare et a quasiment disparu des débarquements. Ces ressources partagées, très vulnérables aux variations des conditions environnementales, continuent de subir une forte pression de pêche qui est renforcée, depuis quelques années, par le développement de l’industrie minotière en Afrique de l’Ouest qui s’approvisionne en sardinelles notamment.

L’initiative Sardinelle partagée, du programme EAF-Nansen, répond à la nécessité d’une collaboration régionale pour améliorer la gestion des pêcheries de sardinelles dans la zone Nord-Ouest Africaine.

Dans le cadre du programme Nansen, la FAO fournit des appuis ciblés au niveau national en Mauritanie, au Sénégal et en Gambie pour développer des plans d’aménagement et des mesures de gestion spécifiques au Sardinelles.

De plus au niveau régional, la FAO et notamment le COPACE facilite la collaboration des scientifiques et des gestionnaires pour l’harmonisation des mesures de gestion.

Le Navire de recherche Dr Fridtjof Nansen étudie les ressources et forme les scientifiques de la sous-région depuis les années 70. Le programme EAF Nansen dispose d’un bateau/navire de recherche qui effectue des campagnes en mer depuis les années 70 pour étudier les ressources et l’environnement marin.

Ce bateau/navire permet de fournir aux pays de la sous-région dont le Sénégal et le groupe de travail régionale d’évaluation des stocks des petits pélagiques FAO/ COPACE, des informations scientifiques indispensables à la gestion des pêches et notamment des données pour évaluer les stocks de poissons exploités dans les eaux nationales et de la sous-région. Ce navire est également un lieu d’étude et de formation scientifique puisqu’il embarque et forme les scientifiques de la sous-région dans tous les domaines des sciences halieutiques et océanographiques.

Des études scientifiques spécifiques aux sardinelles sont actuellement en cours grâce au navire de recherche et concernent, l’analyse génétiques des populations de sardinelles pour déterminer s’il s’agit bien d’un seul et même stock qui est exploité en Afrique du Nord, l’étude du parcours migratoire des sardinelles et une étude sur les qualités nutritionnelles des sardinelles.

Renforcer le dialogue et la coopération sous régionale

Le Groupe de travail FAO/COPACE sur l’évaluation d’états de stocks en Afrique Occidentale se réunit annuellement pour faire l’analyse des données scientifiques et évaluer l’état des stocks de petits pélagiques. Ces réunions qui regroupent des experts et scientifiques des pays concernés, des autres pays membres du COPACE et des experts de la FAO permettent d’informer les gestionnaires des pêches sur l’état des stocks exploitées et de formuler des avis scientifiques pour donner une base sur laquelle les pays peuvent décider. Comme le groupe de travail a trouvé l’état des stocks de sardinelles très préoccupant, la FAO a lancé des activités d’appui pour renforcer la collaboration scientifique régionale des sardinelles en particulier, à travers le sous-groupe spécifiquement dédié aux sardinelles

Les dernières réunions concernant le sous-groupe sardinelles ont été tenues en mars et mai dernier et les travaux d’analyse sont toujours en cours mais les premières analyses laissent apparaitre un niveau de surexploitation inquiétant des yaboy ou sardinelles rondes (Sardinella aurita). Les analyses seront finalisées et discutés lors de la prochaine réunion du groupe de travail FAO/COPACE sur l’évaluation des stocks de petits pélagiques de la côte Nord-Ouest Africaine qui se tiendra très prochainement.

Vers un plan d’aménagement des sardinelles au Sénégal

Compte tenu à la fois de l’importance de la pêche des sardinelles au Sénégal et sa contribution à l’économie, à l’emploi et à la sécurité alimentaire et nutritionnelle et de l’urgence de la situation, le Ministère des Pêches et de l’Economie maritime du Sénégal a sollicité l’appui de la FAO pour gérer cette pêche selon l’approche écosystémique des pêches.

Pour ce faire, un projet a été initié en 2021 au Sénégal visant l’élaboration d’un plan d’aménagement des pêcheries de sardinelles.

Ce projet a déjà permis de former des scientifiques et de collecter des données biologiques et socio-économiques indispensables à la gestion des pêches. Un premier diagnostic de la pêcherie a été effectué et discuté avec l’ensemble des acteurs de la pêcherie durant un atelier de deux jours qui s’est tenu à la Direction des Pêches maritimes.

Cette réunion a permis également d’identifier les problèmes et les solutions envisageables pour gérer cette pêche de manière durable.

Les pêcheurs et les représentants des CLPA ont tous constaté une très forte diminution des débarquements des sardinelles rondes dans tout le pays et observent une réorientation de l’activité de pêche sur la sardinelle plate, ce qui risque de menacer la durabilité de la pêche cette espèce également.

Les femmes transformatrices ont alerté les participants sur la difficulté de se procurer des sardinelles à transformer et sur l’augmentation très forte des prix des sardinelles.

Les organisations professionnelles des différentes localités côtières du Sénégal de même que les comités locaux de pêche artisanale ont alerté les gestionnaires, notamment, sur le problème de la pêche des juvéniles, sur le manque de contrôle de l’accès à la pêcherie qui menacent la durabilité de la pêcherie et ont réitéré leurs inquiétudes concernant les usines de farine de poisson et leur approvisionnement avec du poisson frais plutôt qu’avec des déchets comme il se devrait.

Tous les participants se sont accordés sur l’urgence de restaurer et préserver les sardinelles et leurs habitats, pour garantir la contribution des yaboy à l’alimentation des populations du Sénégal.

Ils ont également insisté sur la nécessité de renforcer la valorisation de ces ressources et leur contribution à l‘économie et l’emploi au niveau locale et national. Cette première réunion de concertation constitue la première étape cruciale d’un long processus qui nécessitera la participation et l’implication de tous pour la gestion responsable de la pêche des sardinelles au Sénégal et dans la sous-région, selon l’approche écosystémique des pêches.

[1] l’Année Internationale de la pêche et de l’aquaculture artisanales 2022 (ou IYAFA 2022/ AIPAA 2022) a été déclarée cette année par les Nations Unies